Frac



Exposition
Philippe Gronon

Du 6.07 au 9.09.2001 Frac, Carquefou

Le Frac des Pays de la Loire, installé depuis septembre 2000 dans ses nouveaux locaux près de Nantes, montre durant l'été une importante exposition des oeuvres du photographe Philippe Gronon. Il s'agit de la première exposition de cette ampleur. L'artiste présente pour l'occasion un ensemble d'oeuvres récentes en plus de quelques séries antérieures. Un catalogue bilingue co-produit avec le 19 Centre Régional d'Art Contemporain à Montbéliard et le Frac Franche-Comté avec un texte de Régis Durand et un entretien de l'artiste avec Jean-Marc Réol, fait le point sur son travail.

Philippe Gronon mène depuis une dizaine d'années une réflexion singulière sur la photographie tant d'un point de vue conceptuel que technique. Il réalise ses photos en noir et blanc, à la chambre ; il monte et il assemble les tirages sur des structures en aluminium après les avoir détourés et assemblés, ce qui leur donne un relief particulier. Fichiers de bibliothèques, écritoires, tableaux noirs, hublots ...l'artiste questionne frontalement des objets choisis pour leur esthétique, leur richesse historique et leur charge symbolique.

Certaines de ses photographies comme les écritoires ou les tableaux noirs sont des relevés méticuleux de surfaces d'inscriptions, avec les multiples traces d'usage ou de fabrication qu'elles portent, comme autant de signes de la marque du temps. Régis Durand souligne dans le catalogue qu'elles fonctionnent aussi comme "des surfaces d'attraction". C'est le cas de façon encore plus explicite avec les hublots ou les moteurs : "sortes de trous noirs, espaces de grande densité dans lesquels le regard est lui aussi aspiré". La façade des fichiers de bibliothèque quant à elle évoque un "contenu" qui à son tour fonctionne comme une métaphore de la mémoire, ici "archivée".

Les objets utilitaires pris pour cible par l'artiste sont toujours des plans géométriquement simples : "Ils sont intégrés dans des lieux destinés au savoir (écritoires, tableaux noirs, fichiers) et au pouvoir (tableaux de cotation en bourse, coffres-forts), invisibles dans leur contexte pour ce qu'ils sont symboliquement. Le résultat de cette opération photographique qui extrait la chose en la détourant pose alors la question de son statut : ni tout à fait image, ni réellement objet." (Philippe Gronon).

Dans la continuité du travail avec les fichiers, Philippe Gronon a entamé 4 séries importantes que l'on peut voir dans l'exposition. Celle intitulée "Le Paradis perdu" est un travail plus conceptuel d'évocation du livre imprimé (à "l'ancienne" avec des lettres en plomb), un travail commémoratif voire archéologique aussi (ces techniques ont quasiment disparues). Avec "les pierres lithographiques", des photos "encore plus abstraites" d'un procédé très ancien, l'artiste a révélé les accidents inhérents à la surface naturelle du minéral, à cette surface muette qui pourtant a été une matrice pour des images. Avec la série des photos de châssis numériques, Philippe Gronon s'intéresse à d'autres matrices (et à un procédé technologique cette fois) destinées à recevoir les images internes du corps. La dernière série, les "tas de fumier", constitue un véritable tournant dans son travail. Il s'agit d'une quinzaine de photographies prises dans les environs de Paris qui montrent des tas de fumier en premier plan de paysages essentiellement ruraux. Il s'agit de transformations organiques, immobilisées par la photo, en un moment qui ressemble à un paysage...