Frac



Exposition
Laurent Moriceau
Magnum Frac

du 21 mars
au 1er juin 2003
au Frac, Carquefou

Magnum


L'exposition Magnum Frac de Laurent Moriceau au Frac des Pays de la Loire à Carquefou du 21 mars au 1er juin 2003 est la première grande exposition personnelle de l'artiste. Elle prolonge celle récente consacrée au seul Projet des Perméables (juin-août 2002) au Palais de Tokyo à Paris et vise à révèler une pratique artistique qui explore différents champs d'activités sociales. Il s'agit d'un ensemble de propositions qui, sans être spectaculaires, témoignent tout à la fois d'une forme de spectacle, d'une pratique photographique et vidéo, d'une narration, d'objets ou d'interventions qui sont presque toujours l'occasion d'une expérience conviviale. Projets diffus, consommations amoureuses et gourmandes, Perméables, il s'agit avec Magnum Frac de montrer comment Laurent Moriceau, loin de toute grandiloquence, confond l'énergie avec l'œuvre.

Le Frac des Pays de La Loire s'intéresse depuis toujours à Laurent Moriceau, artiste installé à Nantes, dont il possède de nombreuses œuvres. Il apparaissait donc logique que l'institution prolonge cet intérêt par une exposition monographique. Le projet est intitulé Magnum Frac : ce titre évocateur est un emprunt gourmand à une glace espagnole du même nom, il résonne avec humour comme une invitation à la dégustation, justement.

Le travail de Laurent Moriceau explore de multiples formes d’inscription de l’œuvre qui privilégient le processus à l’aboutissement d’une œuvre-objet. La période des Ateliers du Frac des Pays de la Loire à Saint-Nazaire en 1998 a été pour lui l’occasion de développer plusieurs projets initiés ces dernières années où l’œuvre se résoud dans son rapport à l’autre à travers différentes procédures : briquets à échanger, vêtements à confectionner (Le Perméable), consommation métaphorique de l'être aimé (Eva, Eva), rendez-vous lancés (La Lettre Diffuse)...

Le Perméable est un vêtement fait de papier photographique vierge destiné à ne pas être impressionné. Acquis en 1997 par le Frac des Pays de la Loire, cet objet, ce prototype, connaît des développements tout azimut. Ainsi, Lille-Moriceau (Le projet des perméables) a été élaboré dans les locaux du Grand café de St-Nazaire, lors d'un atelier de création textile, au cours duquel l’artiste, un styliste - Elian Lille - et dix étudiants stylistes ont expérimenté les capacités du papier photographique à devenir “tissu”. Un film relate cette expérience. Les collaborations depuis lors n'ont pas cessé, puisque Laurent Moriceau continue à inviter des stylistes et des artistes à explorer cet univers rouge, des espaces entièrement plongés dans la lumière rouge inactinique. A la triennale de Yokohama (Japon, 2001), ces créations étaient liées à un deuxième espace où les spectateurs pouvaient apprécier les vertus des bains de lumière rouge cependant que la présentation d'un repas en lumière rouge était conçu avec un chef-cuisinier.

Dans le droit fil de ces prolongements du Projet des Perméables, le Frac présentera un salon occultant mobile, une sorte de boutique des Perméables, organisera des repas en lumière rouge ouverts au public tandis qu'un film court-métrage aux allures de "fantaisie" (scénario de Pierre Giquel) suggèrera les moments de la préparation d'un dîner dans ces mêmes conditions.

L'art de Laurent Moriceau est clairement érotique comme en témoignent de nombreux projets qui seront montrés ou réactivés dans le premier espace d'exposition du Frac. Les vidéos d'Eva Eva (1996) : Eva dont l'artiste et des amis absorbent l'équivalent du volume corporel en Vouvray pétillant ; celle des Festivités de Marie-Pierre (1997), ou encore les "rituels artistiques " Beama (1999), Offre-moi ta bouche, etc. Cette délicate transgression du tabou de l'antropophagisme trouvera pour l'exposition une forme d'aboutissement avec la confection par un patissier d'un gâteau réalisé dans un moule aux mesures exactes de l'artiste. Un gâteau pourra être partagé lors du vernissage, l'artiste y sera dévoré ou dégusté, consommé métaphoriquement.

Le hasard occupe aussi une place déterminante dans l'art de Laurent Moriceau. Qu'il délègue ou qu'il associe le public le plus varié : les habitants de Fontenay-le-Comte (l'Annuaire diffus), des participants plus ou moins aguerris réunis autour d'une lettre d'amour le temps d'un concours de blagues (La lettre diffuse), un album photographique diffus (L'album diffus), répertoire improbable et savoureux de personnes qui ont croisé son chemin et accepté de jouer le jeu.

L'exposition propose un regard ouvert sur une œuvre qui l'est toute autant, une œuvre qui existe par devenir, par transformations, une œuvre qui se nourrit de l'autre par une énergie partagée.

Judith Quentel