Frac



Exposition
Instantané (69)
Anne-Lise Coste

du 6 juillet
au 31 août 2008
Frac, Carquefou

France


Dans le cadre des Instantanés présentés dans la salle Mario Toran, le Frac des Pays de la Loire invite l'artiste Anne-Lise Coste du 6.07 au 31.08.2008.

Catalogue de l'exposition


Née en 1973, Anne-Lise Coste est originaire de la région marseillaise. Après avoir obtenu son diplôme à l'école des beaux-arts de Marseille, elle s'est installée voici dix ans à Zurich où elle suivit les cours de la Hochschule für Gestaltung und Kunst. Aujourd'hui, elle partage son temps entre Zurich et Palma de Majorque.

Dans un esprit mêlant rébellion, romantisme, humour et désirs utopiques, Anne-Lise Coste ancre sa pratique dans le dessin et le graffiti, ce qui lui permet de fixer sans figer son énergie impulsive et intuitive. Le langage, l'écriture, en constant dialogue avec le dessin et la peinture à l'air spray (bombe) ou l'air brush (aérographe), occupe une place centrale dans l'œuvre : poèmes, notes, extraits de romans, métaphores, répétition de certains mots ou phrases...Le tracé est ténu, spontané, et les lettres capitales tremblent sur leur base comme esquissées par un enfant. De cet univers intimiste, métissant la naïveté et l’ironie, ressort une certaine part de violence, très présente dans l’ensemble de peintures intitulé Sacrées et profanes, exposé en 2007 à la galerie parisienne Art:Concept. Dix-sept images, exécutées grossièrement à l’acrylique sur toile, où Anne-Lise Coste bouscule les conventions picturales et adopte une manière frustre, cernant les formes d’un contour noir épais, dans des couleurs franches et sans demi-teintes. La référence à l'art brut affleure dans ce refus délibéré des règles linguistiques et esthétiques ; une véhémence expressionniste agit aussi au cœur de cette narration fragmentée qui promène le visiteur de la figure du discours à l'impact visuel du signifiant, du texte à la forme, de la forme au sens.

Les commentaires d'Anne-Lise Coste sur la politique et la vie quotidienne décrivent souvent une forme de vif mécontentement. Cette posture d'opposition fonde l'ensemble de sa dernière exposition personnelle à la galerie barcelonaise Nogueras Blanchard. Intitulée Save Picasso, l'exposition fait la critique mordante du capitalisme culturel et stigmatise la manière dont la société use et abuse des artistes dans les stratégies de marketing et les campagnes publicitaires. Peignant sur les pages de journaux financiers, Anne-Lise Coste égrène les slogans anti-autoritaires (Professionalization is killing art / La professionnalisation tue l'art) et d'étranges assertions (You care for me I care for you / Tu prends soin de moi je prends soin de toi). Ses interjections organisent une forme d'activisme pragmatique nouant des liens fragiles entre la sensibilité individuelle et les stéréotypes de réalité générés par les structures sociales et politiques dominantes.

Une autre part du travail d’Anne-Lise Coste s'épanouit dans le domaine de la sculpture, de la construction et de l'installation. En une minute (2007) est une tour échaffaudée en bâtonnets de bois, posée sur une chaise faiblement éclairée par une ampoule nue, ce qui confère à cet improbable édifice une monumentalité étonnante. Le titre de l’œuvre correspond peut-être au temps qu’il faudrait pour détruire cette dernière et pèse comme une menace sur la précarité qu’il désigne. L'installation Jamais jamais jamais (2008) met en scène dans un espace aux murs noirs des éléments de la cosmologie personnelle de l'artiste : bougies, ampoules, pages de journaux...Dans ce contexte à la fois domestique et fantastique, une sculpture faite de matériaux recyclés figure un personnage générique, Poor man, qui rappelle la nature brute des œuvres totémiques et primitives d'artistes comme Jean Dubuffet ou Jean-Michel Basquiat.

Tout comme ses dessins, les installations d'Anne-Lise Coste distillent des atmosphères émotionnelles fluctuantes. Libre, nomade, espiègle et provocateur, son univers pulvérise les catégories fermées pour une micropolitique de l'œuvre nourrie d'idéalisme, de dérision et de désespoir.

Eva Prouteau