ERNEST T., Sans titre. Toile n° 147, 1990
Carte blanche à Anabelle Hulaut, à l’invitation de l’École municipale d’arts plastiques de Cholet
Gilles Barbier, Jennifer Bornstein, Wim Delvoye, Daniel Dewar et Grégory Gicquel, Ernest T., Christelle Familiari, Hans-Peter Feldman, Michel Gerson, Jonathan Monk, Laurent Moriceau Guillaume Paris, Liza May Post, Pascal Rivet, Jean-Jacques Rullier, Roman Signer,
Œuvres de la collection du Frac des Pays de la Loire,
FRAC de Basse-Normandie, Le Ring-Artothèque de la ville de Nantes, Musée de La Roche-sur-Yon, Galerie Emmanuel Perrotin, collection personnelle François Morellet
Cholet
Les œuvres présentées dans la galerie du Musée d’Art et d’Histoire issues majoritairement de la collection du Frac des Pays de la Loire et dans une moindre mesure, des collections de l’Artothèque de Nantes, du Frac Normandie, du Musée de La Roche sur Yon, de la Galerie Emmanuel Perrotin et de la collection personnelle François Morellet, auxquelles il faut ajouter la création d’Anabelle Hulaut, s’inscrivent dans une tradition qui trouve ses racines au XIXème siècle et au début XXème, tradition ou plutôt une nébuleuse constituée d’une poignée d’artistes à l’esprit frondeur, dissidents et excentriques, qui utiliseront comme moteur de leurs créations, le dérisoire et la dérision, l’humour et le sarcasme, l’absurde et l’ironie ou encore le grotesque et la farce, à des Fins volontairement polémistes et subversives.
On peut citer comme référents historiques : Théophile Gautier, Alphonse Allais, le Flaubert de «Bouvard et Pécuchet» (ou l’apologie de l’idiotie), Jacques Vacher, Raymond Roussel ou encore Tristan Tzara, Marcel Duchamp, Francis Picabia, Raymond Queneau et ses compères Oulipiens etc.
Enfin, autant d’artistes considérés fort longtemps, par les détenteurs de la culture officielle, comme des figures singulières en marge de la grande et sérieuse histoire de l’art.
Or, avec le recul, on mesure à présent la pertinence de ces attitudes, qui semblent anticiper de plusieurs décennies les révolutions artistiques du XX ème siècle.
Ces esprits trublions, pourfendeurs des règles établies, qui «mitèrent » et minèrent de loin en loin le territoire de l’art, ont donné naissance à une progéniture abondante. On peut même prétendre que ces attitudes, dans leurs grandes diversités d’approches, sont une des dominantes de la création artistique de ces trente dernières années.
Cette exposition essaie, à sa manière, de relater cette présence à travers plusieurs générations d’artistes, quelques figures presque historiques dont François Morellet, jusqu’à des artistes «émergents» qui perpétuent, à leur manière, cette esthétique «ubuesque et oulipienne». Bien sûr, il existe des différences notoires entre chacune de ces propositions, de même que le loufoque et l’absurde ne sont pas de même essence que l’ironie ou la dérision, de même que l’amusement et l’espièglerie n’ont pas nécessairement la gravité critique de la farce et du grotesque, de même l’œuvre de François Morellet, pour ne prendre que cet exemple, ne relève pas des mêmes intentions, ni de la même esthétique, que celle de Wim Delvoye, et cet exemple vaut pour tous les artistes présentés en ce lieu.
Néanmoins, au sein même de leurs différences, un air de famille subsiste, (proches parents et cousins éloignés) tous ces artistes privilégient la pensée intuitive à la pensée abstraite, montrent une affection commune pour le déraisonnable et a contrario une désaffection pour le rationalisme (ou tout du moins ce dernier est considérablement perverti), préfèrent l’instable au stable, ont un goût certain pour le paradoxe et, en conséquence, se méfient des absolus et des certitudes, se plaisent à créer des procédures de déplacement et de glissement, les mêmes qui sont à l’œuvre dans les calembours et les mots d’esprit, créant ainsi des sens inattendus qui perturbent nos repères, les codes établis et les significations univoques.
Pour résumer et conclure, ils affectionnent toutes les procédures de renversement et leurs œuvres se présentent dès lors comme des exceptions, qui dans leurs insubordinations rentrent en conflit avec le général, en ayant naturellement à l’esprit que seule l’exception pense le général avec l’énergie de la passion.