Vue de l'exposition : Axel Huber, 2007
cliché Marc Domage, © Frac des Pays de la Loire
Vue de l'exposition : Axel Huber, 2007
cliché Marc Domage, © Frac des Pays de la Loire
Vue de l'exposition : Axel Huber, 2007
cliché Marc Domage, © Frac des Pays de la Loire
Vue de l'exposition : Axel Huber, 2007
cliché Marc Domage, © Frac des Pays de la Loire
Vue de l'exposition : Axel Huber, 2007
cliché Marc Domage, © Frac des Pays de la Loire
Vue de l'exposition : Axel Huber, 2007
cliché Marc Domage, © Frac des Pays de la Loire
Vue de l'exposition : Axel Huber, 2007
cliché Marc Domage, © Frac des Pays de la Loire
Vue de l'exposition : Axel Huber, 2007
cliché Marc Domage, © Frac des Pays de la Loire
Axel Huber, artiste suisse né en 1955, fait ses études à l’Ecole supérieure des Beaux-Arts de Hambourg dans les années 80, mêlé à un milieu très vivant et alternatif, artistique et cinématographique. Il suit l’aventure Fluxus, participe à certaines performances, croise Sigmar Polke, Nam June Paik ou encore Martin Kippenberg, puis arrive à Nice, à la Villa Arson, aux côtés de Christian Bernard et Christian Besson, en tant que conseiller artistique et commissaire d’exposition. Il vit aujourd’hui à Vienne (Autriche).Ses premiers travaux — de grands monochromes noirs assez radicaux — ouvrent le dialogue permanent qu’Axel Huber entretient avec la peinture et marquent durablement un parcours artistique hanté par le noir et la nuit. La photographie occupe ensuite une place importante dans la production de l’artiste, qui déclare toutefois « se foutre des matériaux » et les utiliser tous, sans hiérarchie.
Son œuvre s’intéresse à ce qui est en marge du système de l’art, et esquisse en filigrane une histoire très personnelle des communautés alternatives. A l’instar de son ensemble photographique intitulé Quartier latin, réflexion liée au situationnisme. Guy Debord refusait qu’on publie sa photographie. Axel Huber part de ce déni et décide de photographier les lieux parisiens qui ont abrité les dérives situationnistes. Il s’attache principalement aux reflets (dans les vitrines des cafés par exemple) puis retravaille cette matière ténue et obscure directement sur négatifs. Le résultat a presque valeur de manifeste : si Axel Huber est sensible aux modes de vie subversifs, induisant un rapport au monde et à l’image singuliers, il adopte en tant qu’artiste une manière non-subversive, non-évidente, non-médiatique, pratiquement invisible. Et combat ainsi, discrètement, la société du spectacle.
Il prend très tôt la double-position d’artiste et de commissaire, contrevenant ainsi à l’adage « On ne peut s’exposer soi-même si l’on expose les autres ». Son travail est fortement régi par les énergies qui sous-tendent une exposition. Il vient de publier, en collaboration avec la Station (Nice) un livre d’artiste conçu sur la problématique suivante : que faire avec autant d’artistes réunis dans un même événement ( en l’occurrence, l’exposition Egosystème, au Confort Moderne, Poitiers) ? Ont-ils quelque chose en commun ? Comment éviter la réunion formelle autour d’une thématique greffée artificiellement ? Il demande alors à chaque artiste de prendre la pose d’un flamand rose, pour que « primitivement », quelquechose advienne dans l’espace. L’édition présente la collection brute de ces prises de vue.
Son regard sur l’art, référentiel et complexe, se nourrit en outre de collaborations qui favorisent les jeux d’appropriation et de relecture vertigineux. Récemment, il expose avec Marcus Geiger une installation mixte révélatrice de cette démarche hybridée, feuilletée. Geiger s’inspira d’un cliché daté de 1902 montrant des artistes membres de la Sécession viennoise (Klimt, Moser, Orlik...). Il fit reprendre certaines poses à des artistes contemporains et créa sur cette base un ensemble de sculptures de feutre très colorées. Axel Huber intervient alors sur cette installation et y adjoint, en dialogue avec les sculptures, des peintures de nus féminins trouvées aux puces parisiennes. Ces huiles sur carton ou bois, réalisées dans les années 30, figurent des visages et des corps étonnants, des modèles âgés, cabossés, exécutés sans qualité. A ce vis-à-vis troublant entre artiste et modèle, Huber ajoute une dimension supplémentaire sous la forme d’un mur de toiles et de photographies réalisées par ses soins. S’en dégage une réflexion très personnelle sur la copie et l’appropriation : une peinture en référence à Polke (en lien à une exposition de cet artiste qui se tenait au même moment), une petite toile repeinte en hommage à Asger Jorn (qui lui aussi glanait certains supports sur les marchés aux puces), une autre en rapport à Bernard Buffet (une toile d’après Manet représentant des femmes nues que Buffet a reprise et repeinte énormément, en grand format et qu’Axel Huber réduit à la taille originale réelle), une autre toile repeinte en hommage à Arnulf Rainer... Au total 23 œuvres qui témoignent d’une mise en abîme riche et transgressive. Et éclairent peut-être le projet d’Axel Huber : recomposer en permanence, dans une conversation plastique en va-et-vient fructueux avec l’histoire de l’art, la notion même de la peinture, et plus largement, interroger incessamment notre rapport à l’image.
Eva Prouteau